samedi 5 janvier 2013

What the Beck are you doing?







Attention: ceci n'est pas une chronique. Beck nous a certes présenté il y a quelques semaines un recueil de nouvelles chansons plus de quatre ans après son dernier disque, le très digne "Modern Guilt", sous la forme d'un album livret très élégant. L'objet propose un "artwork" soigné ainsi que les paroles et partitions complètes de chaque chanson, mais pas de musique... ou si vous préférez, aucun moyen d'écouter les chansons interprétées et jouées par Beck. Pas de téléchargement ou de "vrai" album à venir, et c'est là tout le concept: profitez de cette occasion inespérée pour donner vie vous-même à ces nouvelles oeuvres, et vous aurez même droit à un petit quart d'heure de gloire si vous postez votre démo sur le web.

Vous ne savez pas lire la musique et n'avez jamais joué d'un instrument? "Dommage pour vous" semble dire un Beck hautain à ses fans... oui, Beck Hansen, l'apôtre des losers. De quoi s'agacer s'il décide de commercialiser ses propres versions à l'avenir, car jusqu'à aujourd'hui les musiciens sortaient d'abord un disque et seulement ensuite un livre de partitions pour les mordus ou les musiciens en herbe. Aurait-on affaire à un petit malin tentant d'inverser ce schéma tout en passant pour un esprit novateur?...

Qu'une chose soit claire: j'ai toujours adoré la musique de Beck, depuis ses débuts lo-fi foutraques jusqu'aux développements plus prétentieux de ces dix dernières années, et les histoires de scientologie autour du personnage m'ont toujours laissé de marbre. Cela ne nous... regarde pas, comme dirait l'autre. Idem pour les ambitions de plus en plus avant-gardistes de l'artiste, qui a enchaîné une décennie spontanée et vivante avec une deuxième décennie plus calculée et taciturne, mais pas dépourvue d'intérêt. Peut-être avait-il en tête de continuer à surprendre?... En tout cas, le doute persiste.

Quoi qu'il en soit, et à première vue, le site songreader.net semble confirmer qu'une multitude de pèlerins est déjà venue se jeter aux pieds de l'idole à l'aube de sa troisième décennie de créativité, nouvelle étape de sublimation artistique. Oui, beaucoup de gens ont relevé le noble défi lancé par Beck, et étant moi-même un musicien raté, artiste warholien et star du rock dans une vie parallèle j'ai écouté avec une certaine curiosité l'ensemble des contributions apportées à ce jour, histoire d'entendre les nouvelles chansons mais aussi dans le but secret de me marrer un peu. Comme prévu, il y a vraiment beaucoup de daube, quelques trucs qui font pitié, des pertes de temps, et même des grecs. Autant dire que les quelques dizaines de candidats font souvent figure d'âmes perdues venues chercher un échantillon de gloire au rabais sur un programme télé de seconde zone (on dirait une vieille chanson de Beck, tiens).

Parmi cette masse informe de liens Soundcloud et de vidéos anecdotiques sur YouTube, il y a tout de même des versions qui valent le coup. Si comme moi vous avez encore un semblant de curiosité pour l'oeuvre de Beck n'hésitez pas à jeter une oreille sur le stream intégral de "Song Reader" interprété par le compétent mais très mièvre Portland Cello Project. Dans l'ensemble, on peut dire que "Song Reader" s'appuie sur le penchant folk de Beck et les compositions rappellent essentiellement la période "Mutations" et sa cousine dépressive "Sea Change".

La chanson la plus reprise sur le site "songreader" est de loin "Old Shangaï", dont même les versions les plus douteuses laissent un arrière-goût agréable (avec un minimum d'imagination, évidemment). Plusieurs autres titres bien écrits laissent penser que Beck aurait pu se contenter de sortir un album dans le plus simple appareil, c'est-à-dire en interprétant lui-même, Johnny Cash-style, ce qui semble être une jolie collection de chansons: "Don't Act Like Your Heart Isn't Hard", "Saint Dude", "Do We? We Do", "Just Noise", "Please Leave a Light On When You Go" ou encore "Title Of This Song", indices que toute flamme n'est pas morte chez ce songwriter. Bien au contraire.



Petite sélection de versions intéressantes qui rendent la "désincarnation" de Beck plus que frustrante:
















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