jeudi 22 novembre 2012

Angel Olsen: "Half Way Home"







Pour commencer par un bon vieux cliché je dirais qu'Angel Olsen, c'est d'abord une voix. La jeune américaine de St Louis a ce don de captiver dès qu'elle se met à chanter et ce n'est pas une question de timbre ou de technique, même si le talent et la maîtrise de la demoiselle sont assez exceptionnels. Ce qui est immédiatement frappant, c'est la personnalité et la maturité du chant et cette envie évidente de raconter quelquechose. J'en profite pour citer les mots d'un prof, des mots qui m'ont marqué, il y a déjà pas mal d'années (et pourtant je détestais ce type): "Avec la technique on peut impressionner les gens, mais on ne peut pas forcément les toucher".






Alors que dire de ce second album "Half Way Home"? D'abord, que la musique d'Angel Olsen mérite bien un petit détour du côté de la tradition folk américaine. Le disque, sorti sur le label Bathetic, respire les grands airs champêtres et l'innocence flower power des années 60/70, avec un léger parfum indé-bucolique qui laisse deviner la présence de Bonnie 'Prince' Billy en coulisses. La belle Angel a beaucoup collaboré avec lui ces dernières années mais elle ne semble heureusement pas influencée outre mesure par les encombrantes tendances loufoques et pseudo-mystiques du personnage. Disons qu'elle s'en tient à une réalité personnelle plus simple et fleur bleue, sur une production sobre qui rappelle sans équivoque "I See a Darkness", album considéré à juste titre comme l'un des meilleurs du 'Prince'.

Pour Angel Olsen "Half Way Home" est un pas en avant considérable comparé au très lo-fi "Strange Cacti" de l'an dernier, mais l'ennui guette parfois malgré l'esthétique irréprochable de la musique, la faute à un minimalisme complaisant qui prive souvent les chansons de relief. Instinctivement, on attend de cette sublime voix qu'elle soit soudainement transportée par des harmonies, des choeurs, une section rythmique ou des arrangements soignés mais c'est le contraire qui se produit, et de façon trop systématique. La chanteuse est livrée à elle-même sur une bonne moitié du disque, seule avec sa guitare ou accompagnée de quelques rachitiques notes de basse, ce qui rend l'affaire un peu laborieuse sur la longueur. Pourtant, cette délicate artiste ne fait pas dans le misérabilisme, et les titres les plus "habillés" donnent une toute autre dimension à sa musique - comme par exemple "The Waiting":  







Un rien suffit à mettre en valeur la beauté classique de ces morceaux mais hélas, "Half Way Home" confond souvent ce "rien" avec des absences un peu trop radicales. On ne parle pas d'ajouter un orchestre symphonique ou des cuivres au moindre couplet, même si l'on soupçonne Angel Olsen de poser ici les bases de futurs albums beaucoup plus travaillés, mais on peut s'étonner des disparités entre un "Acrobat" tout en intensité qui dissimule de subtils arrangements et un "Always Half Strange" excessivement dépouillé, presque laissé pour compte.

Malgré tout, si l'on prend ce disque tel qu'il a été conçu, avec toutes ses caractéristiques de disque intime et profondément personnel, on ne peut nier la qualité qui s'en dégage. Les comparaisons avec d'autres artistes comme Cat Power ou Feist ne tarderont pas à fuser mais il faut d'ores-et-déjà souligner qu'il n'y a pas d'ambition pop à proprement parler chez Angel Olsen et aucun maniérisme mélodramatique susceptible de faire pleurer dans les chaumières. Le charme rétro de ses intonations et son goût immodéré pour un folk plus traditionnel annonce plutôt l'éclosion d'un talent brut, en dehors du temps, qui se démarque sans effort du tout-venant folk indé. Une belle découverte.







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