vendredi 2 novembre 2012

Swervedriver: rétrospective






Voici une autre rétrospective issue de mon blog sur Visual Music. Swervedriver mérite bien sa place ici, puisque "Maelstrom" est le titre d'une de leurs chansons. Une sorte d'hymne officiel de cette page dirons-nous. Ne reste plus qu'à présenter ce groupe des années 90 fort méconnu dans nos contrées, sorte de chaînon manquant entre le grunge et la britpop.





RAISE
1991
Les chevelus d'Oxford démarrent en trombe avec un premier album de très bonne facture incluant les excellents premiers singles du groupe, "Son Of Mustang Ford", "Rave Down" et "Sandblasted", hymnes routiers invitant à mettre le pied au plancher et foncer vers l'horizon dans un nuage de vapeurs toxiques (un thème récurrent sur leurs deux premiers albums). Adam Franklin et sa bande combinent habilement de superbes riffs aux relents grunge avec un son hypnotique dans la plus grande tradition shoegaze. On ne sait pas trop à quoi s'en tenir: les mélodies planantes et le chant de branleur de Franklin pourraient placer Swervedriver dans la catégorie dream-pop des neurasthéniques My Bloody Valentine, Chapterhouse ou Slowdive, mais la frénésie des guitares et de la section rythmique évoquent davantage un rock alternatif hybride qui lorgne du côté de la scène slacker américaine, partageant avec cette dernière un amour évident pour les Stooges (fans de Dinosaur Jr, par ici s'il vous plaît). 





MEZCAL HEAD
1993
Malgré l'étiquette shoegaze estampillée à la va vite par la presse musicale (sans doute influencée par la signature sur le label Creation aux côtés de Ride), le groupe attire l'attention du jeune public grunge US qui accueille "Raise" et "Mezcal Head" avec enthousiasme. Swervedriver tourne outre-atlantique en compagnie de grosses pointures comme les Smashing Pumpkins et Soundgarden, confirmant rapidement une réputation de valeur sûre en concert. Ce second album bénéficie de la classe du nouveau batteur Jez Hindmarsh et d'une production plus détaillée. Adam Franklin affine ses compos et livre quelques-uns de ses meilleurs titres, dont le monumental et hypnotique single "Duel" qui reste la carte de visite du groupe. "Mezcal Head" est régulièrement cité un peu partout comme l'un des plus beaux trésors de l'ère grunge, car à l'écoute de ce titanesque album c'est bien d'une sorte de grunge qu'il s'agit, mâtiné d'un subtil groove anglais et d'une sensibilité mélodique qui ne demande qu'à être exploitée.





EJECTOR SEAT RESERVATION
1995
L'album maudit: deux ans après "Mezcal Head" le shoegaze n'est plus qu'un lointain souvenir, la scène grunge bat de l'aile et tous les regards sont désormais tournés vers la britpop. Du côté d'Oxford on ne parle plus que de Supergrass et de Radiohead, tandis que les kids américains s'amourachent de la nerd-attitude de Weezer et Green Day. Les démodés Swervedriver poursuivent leur progression vers un rock plus direct et mélodique mais rien n'y fait: le brusque changement de contexte musical joue en défaveur du groupe qui se fait lâcher par Creation une semaine seulement après la sortie d'"Ejector Seat Reservation", titre prophétique s'il en est. Quasiment aucune promo n'est faite pour l'album qui sera même privé d'une sortie américaine jusqu'en... 2003! Difficile aujourd'hui encore de se procurer ce disque fantôme, jamais sorti en France (pourtant réédité en 2009 en compagnie de "Raise" et "Mezcal Head"). Une grande injustice pour cet album envoûtant et ses nombreuses perles: "The Other Jesus", "How Does It Feel To Look Like Candy?" ou "The Birds", entre autres. Swervedriver passe du statut de "next big thing" au club peu enviable des groupes les plus sous-estimés de l'époque.





99th DREAM
1998
Après le cuisant échec d'"Ejector Seat Reservation" Adam Franklin rebondit vite et signe dès 1996 chez le mastodonte américain Geffen. "99th Dream" est pourtant enregistré dans la douleur, la maison de disques exigeant un son plus commercial selon des critères douteux. Le mix final fait d'ailleurs souvent penser à un mélange opportun entre les premiers disques d'Oasis et The Bends de Radiohead, ce qui n'empêche pas le groupe d'imposer sa personnalité sur quelques très bons morceaux (la chanson-titre, "Up From The Sea", "She Weaves a Tender Trap", "These Times"...). Néanmoins l'ensemble un peu bridé ne peut que décevoir en comparaison des exaltés "Mezcal Head" et "Ejector Seat Reservation". Comble de la poisse, Geffen entame une restructuration du personnel et vire le représentant de Swervedriver en pleine promo du disque. "99th Dream" ne sortira finalement que deux ans plus tard, trop de contretemps et de problèmes financiers pour un groupe au bout du rouleau qui se sépare discrètement en décembre 98.






Suite à la séparation du groupe Adam Franklin entame une carrière solo, dans un premier temps sous le pseudo Toshack Highway, puis sous son propre nom. On reconnaît aisément le style d'écriture et le son de guitare si caractéristiques de Swervedriver sur les quelques albums parus à ce jour, sans pour autant y retrouver toute la magie et l'ambition du groupe. Le syndrome "solo" habituel, pour résumer, même si le talent et la coolitude du songwriter n'ont pas pris une ride (contrairement à l'allure du bonhomme).

Le statut de groupe culte de Swervedriver a provoqué plusieurs reformations ponctuelles ces dernières années, uniquement pour quelques concerts et apparitions lors de gros festivals américains comme Coachella. Un nouvel album serait prévu pour 2013 donc n'hésitez pas à prendre les devants si vous n'avez pas encore jeté une oreille sur la discographie de ces cavaliers de l'ombre. Peu de groupes peuvent se targuer d'avoir fait vibrer une génération entière des deux côtés de l'Atlantique et d'avoir laissé en seulement quelques années, sans tubes majeurs et à l'ombre du mainstream, une oeuvre qui a influencé un bataillon de hipsters du nouveau millénaire tels que Black Rebel Motorcycle Club, Interpol et de nombreux autres.




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